Memento Mori
A Rouen l’aître* Saint Maclou rappelle aux touristes et curieux qu’autrefois la mort n’était pas exclue de la vie.
Le nouveau RDV où il faut être…
Être ou ne pas être, telle est la question comme le dit le Prince Hamlet.
Classé monument historique en 1862, propriété de la ville de Rouen depuis 1927, l’aître Saint Maclou traverse les siècles conjuguant au passé, au présent et au futur une indéniable originalité. L’aître écrit aujourd’hui une nouvelle page de son histoire prouvant ainsi qu’il n’a pas fini d’être…un extraordinaire monument aux multiples facettes.
*cimetière attenant à un lieu de culte
Âmes fragiles, tremblez ! l’histoire de l’aître Saint Maclou vous embarque dans un mystérieux royaume où les morts côtoient les vivants, où os, crânes et squelettes vous regardent bien en face dans des frissons de peste noire.
Au Moyen Age la paroisse Saint Maclou, associée au textile, est une des plus populeuses de la ville. Quand la peste se déclare en 1348, c’est un quartier durement touché. Le cimetière paroissial, le petit aître, ne suffit plus. Non loin de l’église, les Rouennais construisent le grand aître pour enterrer ceux qui passent d’être à trépas.
Au XVIème siècle, dans l’urgence d’une nouvelle épidémie de peste, autour de la cour centrale, on érige un monument à galeries surmontées de combles servant d’ossuaire. Au centre, les fosses communes témoignent de la violence mortifère de l’épidémie.
A l’aître Saint Maclou, la mort est partout au rendez-vous. Frises ornées de fémurs, de crânes, d’omoplates, cierges et croix de l’office des morts, outils de fossoyeurs, le décor de l’ancien ossuaire rappelle qu’autrefois la mort fait partie de la vie. Sur la porte, un chat noir momifié garde le lieu d’une éventuelle Salsa du démon troublant le repos éternel. Pourtant à l’aître Saint Maclou, on y danse quand même. Entre gigue et sautillement, sinistre carabosse, la mort décharnée et vêtue de linceuls invite l’assemblée à une danse macabre. Les sculptures des galeries Est et Ouest rappellent ainsi l’étrange tempo médiéval où psychose, effroi valsent avec satire et grotesque.
Au royaume des trépassés, s’installe une école en 1661. Pendant plus d’un siècle, des petits Rouennais apprendront à lire environnés de squelettes.
Au XVIIIème, quand les cimetières doivent être installés hors des villes, l’aître perd alors sa fonction d’ossuaire. Il ne cesse cependant pas d’être un lieu de sociabilité. On y installe une sorte de soupe populaire puis des filatures.
En 1793, l’aître devient une fabrique d’armes et en 1911, un pensionnat de filles. En 1940, les Beaux-Arts de Rouen arrivent dans le bâtiment.
Aujourd’hui comme hier, l’aître Saint Maclou reste au coeur de Rouen une pause intemporelle. Une splendide restauration redonne à son architecture moribonde une nouvelle vie. Pour savoir être et renaître… Un nouveau rendez-vous où il vous faut être.
Agathe Poirot-Bourdain
https://www.aitresaintmaclou.fr/
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