BD autour du débarquement en Normandie
Le titre « Deux généraux » démarre en situant bien tant du côté américain que du côté européen les conséquences politiques, économiques et sociales du Crack de 1929 dans les années 1930 et en y rajoutant l’ambiance musicale, croquant à la fois Guy Lombardo, Cab Calloway et Glenn Miller. Puis ce sont quelques vignettes autour de la déclaration de la guerre de septembre 1939 et de ce fait l’engagement comme volontaire de l’Ontarien Law Chantler dans la Highland light infantry of Canada.
Cet ouvrage consacre quasiment toutes ses pages à la préparation du débarquement de Normandie, à la réalisation de celui-ci et à la bataille autour de Caen. En faisant un bond en avant dans le temps, on assiste à l’enterrement le 2 juillet 1997 de Law Chantler ; les survivants de son régiment venant épingler des coquelicots sur le drapeau enveloppant son cercueil. Alors que le kaki, le noir et le gris sont les couleurs habituelles, dans les moments d’intensité dramatique le rouge coquelicot est présent. Avant 1914 peu de coquelicots poussaient en Flandres, mais avec les bombardements, les terrains crayeux devinrent riches en poussière de chaux favorisant ainsi la venue des coquelicots. On remarqua que les champs se couvraient de fleurs rouge-sang après les combats. Le lieutenant colonel John Mc Crae, un médecin militaire canadien fit le lien entre le coquelicot et les morts au champ d’honneur dans son célèbre poème « In Flanders Fields » durant la Première Guerre. Depuis la Première Guerre mondiale, le coquelicot est devenu le symbole des soldats morts au combat dans l’univers anglophone.
L’action de « Deux généraux » est vue à travers le récit d’un narrateur externe qui s’appuie sur les souvenirs de son grand-père et une solide
documentation. Son originalité est qu’il est dessiné par le petit-fils de Law Chantler à partir d’une documentation historique générale ainsi que du journal personnel et du courrier du héros plus le journal de marche du régiment de la Highland light infantry of Canada.
Dans la catégorie des romans graphiques témoignages d’un univers socio-politique, l’ouvrage « Deux généraux » a gagné tout de suite, aux yeux des critiques de BD, une des meilleurs places aux côtés des œuvres de Jo Sacco (qui dépeignent là une réalité contemporaine à travers le monde), « Un printemps à Tchernobyl » d’Emmanuel Lepage, l’œuvre de l’Iranienne Marjane Satrapi, des titres de la Libanaise Zeina Abirached, les livres d’Étienne Davodeau (autour de l’évolution des milieux paysans angevins en France dans les années soixante et soixante-dix ou avec « Les ignorants » au sujet de la classe ouvrière de Brest vers 1950).
« Deux généraux » de Scott Chantler. La Pastèque, 2012. 152
pages. 19, 70 euros.